13.02.21

Percuté par une voiture, un jeune homme passe plus de deux ans dans le coma, finalement se réveille en l’an 2021, ignorant tout de la pandémie actuelle.

Ah, le bienheureux ! Avide de dialogues et de nouvelles, c’est à bon droit qu’il voudra rattraper tout le temps perdu. Et comment lui annoncer qu’il n’a pas manqué grand-chose pendant son lourd sommeil, que le monde pour ainsi dire somnole et que tout manque au contraire ? Masqués ses camarades, de nouveau maquée sa copine, muselées les salles de concert, annulé son stage à l’étranger, interdits ses cours de taekwondo, fermés les campus, à l’hosto son coloc, protocolées les visites, morte la grand-tante, pas bien en forme non plus le pépé…

Quel fardeau pour la mère ! Après avoir sauté de joie et dans les bras de son éternel petit garçon (certes majeur et vacciné alors qu’il dormait), elle fut effrayée par la tâche ingrate qui lui incombait alors : raconter en bonne et due forme – pire encore, résumer ! – ce feuilleton tant rebattu, les innombrables saisons de La Crise sanitaire. Mille et une nuits d’info en continu auraient-elles seulement pu sauver Shéhérazade de représailles certaines ? Plutôt perdre connaissance qu’être ainsi vouée à la torture et aux récits enchâssés !

Elle sauta donc par la fenêtre, miraculeusement restée ouverte pour ventiler et décontaminer la pièce ainsi que le recommande instamment la Haute Autorité de Santé.

C’est tout naturellement qu’elle succéda à son fils sur le lit de réanimation. Les draps sentaient bon la tranquillité, et encore un peu le fruit de ses entrailles. Il faut dire qu’il lui avait tendrement chauffé la place avant de couper le cordon.

En lisant ce fait divers, un individu très isolé mais qui tournait encore bien rond là-dedans se dit que « sortir du coma », c’était la meilleure façon de sortir, à coup sûr ! Ainsi illuminé et traversé d’une énergie nouvelle, il s’étourdit gaiement à l’aide du plafonnier qui attendait d’être fixé et encombrait le seuil depuis des mois. Lesquels, mis bout à bout, font des lustres déjà. 

Qu’on se le dise, une bonne mère et un brave type ne sont jamais à court de grands moyens.

1 Comment

  1. félicitations Lou! Ca commence comme une légende urbaine… et nous transporte pour des lustres !
    j’ai en outre appris qu’on ecrit non pas ” la tache ingrate qu’il lui incombait” mais …”la tâche ingrate qui lui incombait ” c’est logique mais spontanément j’aurais écris “qu’il”…

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