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Je ne sais pas qui frappe à la porte. Je suis en train de passer la serpillière dans la cuisine ; je me fige alors. Tapie, la tête baissée. Ne faisant plus aucun bruit. Restant en apnée, dans le verre d’eau où je me noie. (Et je préfère encore m’y noyer que le faire déborder.) Je lave le sol ; personne ne peut entrer quand un sol est mouillé. S’il était sale, encore… Au bout de quelques secondes, quand il me semble que la présence s’est éloignée, je m’approche, moi, du judas de la porte d’entrée. Sur la pointe des pieds. J’aperçois alors Odette, ma grand-mère. La mère de ma mère. Comme d’habitude, elle semble avoir vingt ans. Je devine un petit paquet entre ses mains. Je pose la mienne sur la poignée, le cœur soudain plein d’hospitalité ; mais elle repart en sautillant avant que je ne puisse lui ouvrir.

Seuls mes yeux s’ouvrent. Je laisserais donc sur le seuil les vivants non moins que les morts… J’aurais tant aimé lui sauter dans les bras, et que nous marchions – que nous dansions même ! – ensemble, sur le lino humide. Humide, il aurait gardé la trace de nos pas.

En prenant mon café, quelques heures plus tard, je me rends compte qu’elle est toujours à la porte, qu’elle est la porte en réalité. Je l’ouvre alors. Ainsi que ce curieux petit paquet qui contenait toute son idée.

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