Je ne sais conjuguer autre chose que les verbes, les intransitifs de préférence, les plus intransigeants des procès. Ce n’est déjà pas si mal, me direz-vous, à l’heure où seul le présent tient à peu près debout, celui d’habitude surtout. Donc oui, je conjugue les verbes, mais rarement l’action qu’ils portent avec aplomb – je ne suis pas un bon complément, ni un bon sujet, à dire vrai. Accorder les expectatives avec le statu quo, ce que je suis ab ovo, me semble tout à fait impossible : que ce soit ou non par manque d’initiative, je relève plus de l’étang que du roseau.
Auxiliaire fidèle, le subjonctif compose avec mon alanguie raideur et me prête parfois sa béquille. Je dois pourtant aider de jeunes élèves à avancer dans les apprentissages, la situation n’est-elle pas risible ? En géométrie, pour leur apprendre à tracer un cercle, je n’ai pu que leur conseiller d’enfoncer très fort la pointe du compas dans la feuille, pour ne pas trop déraper, mais, à cet âge-là, les pierres d’achoppements se changent encore en ricochets, les terminaisons ne sont pas encore toutes trouvées ; je les félicitais alors, quand ils rataient. De toute façon, j’étais bien incapable de leur montrer véritablement comment faire : j’avais toujours tourné maladroitement la feuille et non le compas, déjà un peu plus à l’aise avec le support qu’avec l’outil ; et même de cette façon, le cercle n’était pas net, jamais parfaitement clos, comme s’il fallait pouvoir en sortir. Qu’aucune figure ne puisse s’y inscrire.