Je ne savais pas que les vêtements à rayures, initialement marques d’exclusion, n’étaient portés au Moyen Âge que par les parias de la société – jongleurs, bagnards, hérétiques… Cette symbolique négative perdura en Occident durant de nombreux siècles, jusqu’à l’apparition de la marinière, qui transforma ce déshonorant stigmate en simple indice visuel, fort utile pour repérer les matelots passés par-dessus bord. Voyez comme la mode, et ses prévisibles vagues, peuvent renverser les valeurs, et les jeter aussi à l’eau : de nos jours, porter une marinière revient à se fondre dans la masse océane de poissons accrochés à l’hameçon de la tendance. Aujourd’hui, guère de dandys – voués, selon Barthes, « à inventer sans cesse des traits distinctifs absolument nouveaux » jusqu’à concevoir « [leur] tenue, exactement comme un artiste moderne conçoit une composition à partir de matériaux courants » –, mais beaucoup de zèbres branchés, comme mis en boëtte. Et qui se dandinent.